Dans les anciens vergers, nous avons pu identifier
plusieurs variétés de pommes à cidre et de
pommes dites « de table » ou « à couteau
».
Pour faire un bon cidre, il faut en premier lieu un mélange
de pommes équilibré : amères, douce-amères,
douces, et acides.
Certaines variétés, telle le « Monte-en haut
» et la pomme bariolée « c'huero bris »
en breton, sont très précoces, elles permettent de
faire du cidre à consommer rapidement, début septembre.
Les pommes tardives telles la « Rougette », le «
Pied court, » , la « carel », la « bedange
»sont plus tardives et donnent un cidre plus alcoolisé
et de bonne conservation. Des pommes très tardives , les
« bedan »,parfois appelées « malines au
froid » car elles peuvent rester accrochées aux branches
jusqu'à Noël, apportent une coloration soutenue au jus
et font de très bons cidres de longue conservation .Etablir
un mélange équilibré de toutes ces variétés
est donc avant tout, un savoir-faire qui tient de l'art culinaire.
Mais l'obtention d'un jus (ou moult) n'est pas suffisant pour
obtenir un cidre de qualité ; il faut aussi surveiller sa
fermentation (transformation des sucres en alcool sous l'action
de microorganismes). Avec les pommes des Mottais, le jus obtenu
présente une densité alcoolique comprise entre 1,045
et 1,060. Ce jus, mis en tonneau, évacue rapidement ses impuretés
sous forme d'une substance lourde et brune qui sort par l'orifice
de remplissage : le « chapeau brun », ensuite, vient
une sorte d 'écume blanche , le « chapeau blanc ».Après
ces rejets, il faut suivre l'évolution du liquide avec un
densimètre. La densité diminue régulièrement
et, arrivée à 1,020 , le liquide s'est clarifié
en surface et dépose une boue jaunâtre et visqueuse,
la lie. Il faut alors séparer le liquide clair de sa lie,
en le soutirant dans un autre fût, puis éliminer la
lie. Les fûts doivent être parfaitement propres et toujours
totalement remplis, le contact avec l'air étant néfaste
.L'orifice du fût doit être recouvert par une bonde
spéciale dite « aseptique ». Un verre retourné
sur l'orifice fait le même office : empêcher les microorganismes
de pénétrer tout en empêchant la sortie du gaz
carbonique rejeté lors de la fermentation, qui se poursuit
, plus lentement, maintenant .L'opération finale est la mise
en bouteilles qui a lieu vers le mois de décembre à
la densité1,005 pour obtenir un cidre demi-sec ou à
1,002 pour obtenir un cidre très sec. Notons que les anciens
n'utilisaient pas de densimètre pour surveiller la fermentation,
le simple fait d 'écouter le bruit du pétillement
de fermentation à l'orifice du tonneau, suffisait à
les renseigner.
Il y a encore une cinquantaine d'années, les pommes étaient
concassées à l'aide d'un broyeur à main muni
de deux lourds volants de fonte latéraux afin de faciliter
l'entraînement des couteaux broyeurs. Ce système permettait
à deux personnes de travailler ensemble et réduisait
considérablement l'effort à fournir Le broyat obtenu
ou « marc » était pressé dans un pressoir
à vis verticale. La vis fixée sur une table portée
par une poutre de chêne appelée « fût »,
était surmontée d'une lourde pièce de bois
,le « mouton » qui était surmonté d'une
couronne munie de « clavettes » .Le serrage était
assuré par de lourdes barres. Avant pression, le marc était
disposé en couches alternant avec des lits de paille. Monter
le marc était une opération précise, tout ce
qui débordait était arasé avec un couteau à
marc. Sur les couches de marc et de paille recouvertes d'une toile
de jute, étaient disposées d'épaisses planches
de chêne et la « presse » commençait.
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